Libre-échange et travail forcé: le témoignage du dissident Harry Wu

«Je suis vraiment choqué». La réaction de Harry Wu, lorsqu'il a appris que la Suisse négociait un accord de libre-échange avec la Chine, est sans équivoque. Une réaction à la mesure de son engagement, depuis une vingtaine d'années, contre les violations des droits humains en Chine. Lors de sa visite en Suisse, il a estimé que «la Suisse doit faire pression sur la Chine pour que celle-ci respecte les droits humains dans le cadre de l'accord de libre-échange».

Harry Wu a été invité en Suisse par la DB et ses partenaires de la Plateforme Chine en septembre 2012. Le programme était chargé: lobbying, conférences de presse, débats publics et enfin des rencontres officielles avec les parlementaires suisses ainsi qu'avec des représentants de l'ONU.

Derrière les produits chinois: les camps de travail forcé

Au centre des discussions entre Harry Wu et ses interlocuteurs: le «laogai», ou «la réforme par le travail». On entend par là les quelque 1000 camps de travail forcé dans lesquels, selon Harry Wu, trois à cinq millions d’êtres humains triment aujourd’hui. L'homme sait de quoi il parle. Il a lui-même disparu durant 19 ans dans le Laogai pour cause d’«agitation contre-révolutionnaire». Réchappé des goulags, il s'est exilé aux États-Unis et a fondé, en 1992, la «Laogai Research Foundation». Depuis, il s'est affirmé comme l’un des grands spécialistes et fervents opposants de ce système inhumain.

Durant son séjour en Suisse, Wu a levé le voile sur la réalité des camps de travail forcé en Chine. Il a demandé à la Suisse de ne pas seulement s'intéresser aux produits chinois, «mais aussi aux personnes qui fabriquent ces produits». Le message lancé par le célèbre dissident est clair: l'accord de libre-échange entre les deux pays doit inclure des dispositions contraignant la Chine à respecter les droits du travail et les droits humains, en particulier ceux des minorités ethniques et religieuses.

Les négociations avec la Chine montrent que la Suisse a besoin d'une éthique en matière de commerce extérieur. C'est la conclusion que défend Thomas Braunschweig, responsable politique commerciale à la Déclaration de Berne, dans une prise de position à l'intention du gouvernement suisse.