Entreprises et droits humains: la politique de l’autruche

En rejetant l’initiative pour des multinationales responsables, le Conseil fédéral rate l’opportunité de s’attaquer sérieusement aux importants défis dans le domaine des entreprises et des droits humains. L’initiative pour des multinationales responsables demande que les multinationales suisses respectent les droits humains et l’environnement.

Dans son Plan d’action national relatif aux entreprises et aux droits humains, publié en décembre 2016, le Conseil fédéral souligne que: «Les entreprises domiciliées et/ou actives en Suisse doivent dûment s’acquitter de leurs responsabilités en matière de droits de l’homme.» Le Plan d’action national ne propose toutefois aucune nouvelle mesure contraignante afin de mettre en œuvre cet objectif. Aujourd’hui, le Conseil fédéral rejette l’initiative pour des multinationales responsables démontrant qu’il n’est pas prêt de passer des paroles aux actes et de suivre les développements internationaux.

Le consensus, tant au niveau des Nations Unies que de l’OCDE, est pourtant clair: les entreprises doivent passer à une gestion proactive des risques relatifs aux droits humains et à l’environnement, et ce, en appliquant une diligence raisonnable. L’initiative pour des multinationales responsables propose précisément d’ancrer cet instrument dans la loi suisse.

A cet égard, les pays voisins ont une longueur d’avance sur la Suisse. En effet, la France est sur le point d’adopter une loi qui préconise une obligation de diligence raisonnable. Le gouvernement italien a annoncé en décembre qu’il effectuait des clarifications juridiques en vue d’introduire une obligation de diligence raisonnable. De son côté, l’Allemagne vérifiera dès 2018 qu’au moins 50% des grandes entreprises aient établi une diligence raisonnable d’ici 2020 et envisagera des mesures juridiques si nécessaire.

Les conséquences de la politique actuelle du Conseil fédéral ne sont pas seulement graves pour les victimes de violations de droits humains commises par des multinationales suisses. Elles le sont également pour les nombreuses entreprises qui mettent déjà l’accent sur les principes éthiques et de durabilité dans leurs activités. Des exigences contraignantes de la part de la Confédération seraient bénéfiques pour ces sociétés afin d’établir les mêmes conditions pour toutes les entreprises.

La question fondamentale du cadre juridique dans lequel les multinationales suisses devraient opérer devient de plus en plus urgente. La coalition de l’initiative pour des multinationales responsables, composée de 80 organisations de la société civile suisse, suivra de près le débat parlementaire et se prépare à la campagne de votation. La thématique intéresse vivement le Parlement. En effet, suite à l’adoption du Plan d’action national relatif aux entreprises et aux droits humains en décembre dernier, cinq interpellations ont été déposées à ce sujet. La population suisse se préoccupe également de cette problématique, comme l’a démontré un sondage d’opinion représentatif effectué en juin 2016. Ce sondage révélait que 90% des personnes interrogées veulent que les multinationales suisses soient tenues de respecter les droits humains et l’environnement aussi à l’étranger.

L’initiative pour des multinationales responsables offre l’opportunité au Parlement et à la population de corriger l’inaction du Conseil fédéral et de faire un pas en direction d’une économie suisse durable, équitable et tournée vers l’avenir.

Plus d’information auprès de:

Béatrix Niser, coordinatrice romande de l’initiative pour des multinationales responsables, 078 659 14 03