Réponse de la Déclaration de Berne au communiqué de presse de Philia (non-daté)

Lausanne, le 10 mars 2015

La Déclaration de Berne (DB) a pris connaissance du communiqué de presse diffusé par Philia en réponse à la publication, le 1er mars dernier, du rapport «Un contrat raffiné», qui analyse les relations d’affaires suspectes entre la société genevoise et la raffinerie étatique congolaise, la Coraf. Philia précise ainsi sa position à l’égard des «accusations sans fondement qui ont été formulées à son encontre», tout en s’abstenant de fonder cette position. Malgré ses promesses récentes de «répondre point par point, en toute transparence» (communiqué du 2 mars), Philia ne donne aucun élément factuel permettant de mettre en doute le rapport de la DB.

Nous constatons également que:

  • Suivant un étrange cheminement intellectuel, Philia se défend en validant le travail de la DB, puisque son communiqué se réfère à des «sources proches» de la Congolaise de raffinage (Coraf), citées dans le media Le Potentiel, qui affirment: «De ce point de vue, cette démarche [de la DB] qui s’appuie sur quelques malversations financières, n’est ni plus ni moins une cabale occidentale contre le régime de Brazzaville.»
  • Le propriétaire de Philia, M. Jean-Philippe Amvame Ndong, a lui-même affirmé à la DB que le contrat d’enlèvement à terme obtenu de la Coraf n’était pas l’aboutissement d’une procédure d’appel d’offres. M. Amvame Ndong, tout comme son avocat, Me Michel Bussard, a pu relire la retranscription de sa déclaration avant publication. Les propos tenus par «une source», à laquelle Philia se réfère dans son communiqué, confirment nos dires, puisque celle-ci explique que «le contrat avec Philia SA a permis à la Coraf de se départir du système des appels d’offre».
  • Philia affirme qu’elle ne «se contente pas de revendre immédiatement» ses cargaisons à des tiers, mais qu’elle les vend directement à de grandes sociétés de raffinage de pétrole. Sur la période considérée dans le rapport, soit le second semestre 2013, la DB dispose de documents permettant de contredire Philia. La société genevoise a revendu directement ses cargaisons à des tiers (aux mêmes conditions à l’exception du prix), à Pointe-Noire, où se trouve la Coraf. Les acheteurs étaient principalement des négociants, parmis lesquels Mercuria, AOT Trading et Mocoh, pour ne citer que ses clients helvétiques. Ce sont ces négociants tiers qui se sont chargés de transporter les cargaisons jusqu’aux raffineries. Philia n’apporte donc aucune valeur ajoutée logistique dans le processus, mais empoche des marges élevées pour un simple échange de paperasse. Bien qu’elle en doute sérieusement, la DB a reconnu qu’il est possible que la situation ait changé en 2014, faisant référence à un rapport du consultant CITAC qui mentionnait un navire affrété par Philia.
  • La DB relève par ailleurs que Philia s’abstient d’expliquer ou de «démentir» les nombreuses clauses favorables concédées par la Coraf dans le cadre de ce contrat, contrairement à ce qu’elle promettait en réaction à la publication du rapport.
  • La DB donne toutefois raison à Philia sur un point: dans son rapport, la DB a reconnu explicitement qu’elle n’a rien décelé d’illégal dans les activités de Philia au Congo. Car seule la justice pénale est en mesure de formuler un tel jugement. Par ailleurs, cette apparente licéité n’enlève rien au caractère illégitime du contrat, puisque celui-ci est défavorable à la Coraf, et donc aux finances publiques de la République du Congo.
  • La DB rappelle par ailleurs qu’elle a tenté d’obtenir le point de vue de la Coraf en lui adressant une liste de questions, auxquelles les dirigeants de la raffinerie n’ont pas souhaité répondre. Philia s’est, elle aussi, abstenue de répondre à de nombreuses questions importantes.
  • En novembre, Philia a tenté d’interdire la publication de notre enquête par voie judiciaire. Elle a été déboutée sur deux de ses requêtes et a choisi de retirer les deux autres. La DB attend donc sereinement que Philia étudie «ses possibilités d’action en justice».

Plus d'informations auprès de :

Marc Guéniat, Déclaration de Berne, +41.21 620 03 02, gueniat@ladb.ch