Transparence dans les négociations avec le Mercosur

Aujourd’hui démarre à Genève un nouveau tour de négociation de l’accord entre les pays de l’AELE (dont la Suisse) et le Mercosur. Des ONG suisses et uruguayenne demandent aux États parties la transparence des négociations et une étude d’impact sur le développement durable.

Les négociations d’un accord de libre-échange entre les pays de l’AELE, dont la Suisse, et ceux du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay) ont démarré en juin 2017 dans la plus grande opacité. Les textes de négociation ne sont pas publics, si bien que les citoyens, les parlementaires et la société civile des pays concernés ne savent pas ce que leurs gouvernements sont en train de négocier. Pour la plupart, ils ne savent même pas que ces négociations ont lieu. Pourtant, un tel accord pourrait avoir un impact énorme sur de larges secteurs de la population.

Alliance Sud, Public Eye, Swissaid, la Fédération romande des consommateurs et Friends of the Earth Uruguay demandent aux partenaires de négociation de:

  • Communiquer régulièrement sur l’état des négociations. Les secteurs de la population potentiellement affectés doivent impérativement être consultés sur le contenu de l’accord.
  • Réaliser une étude d’impact sur le développement durable et les droits humains et mettre en place un processus pour assurer le suivi de l’impact économique de l’accord avant la conclusion des négociations, comme demandé notamment, en Suisse, par la Commission de gestion du Conseil national pour tous les accords de libre-échange. Une telle étude permettrait de se faire une idée préalable des gagnants et des perdants et de lancer un débat public.

En effet, bien que nous ne connaissions pas les textes des négociations, nous savons par expérience que ce genre d’accords va bien au-delà des questions commerciales et que plusieurs secteurs pourraient être affectés:

  • Agriculture: cet accord risque de profiter surtout aux grandes entreprises agro-industrielles des pays du Mercosur et d’aggraver les problèmes existants en termes de déforestation, expulsion des petits paysans et perte de souveraineté alimentaire dans ces pays, en renforçant encore davantage un modèle agricole orienté vers les exportations. Dans les pays de l’AELE, les paysans seraient aussi pénalisés par des importations de viande, soja et sucre à des prix défiant toute concurrence et répondant à des standards phytosanitaires inférieurs à ceux appliqués en Suisse. Par ailleurs, le renforcement des droits de propriété intellectuelle risquerait de privatiser les semences, rendant beaucoup plus difficile leur échange et commercialisation par les paysans.
  • Santé: le renforcement des droits de propriété intellectuelle sur les médicaments rendrait plus difficile et onéreuse la commercialisation de médicaments génériques dans les pays du Mercosur.
  • Développement productif: les petites et moyennes entreprises du Mercosur risquent d’être pénalisées par les importations industrielles en provenance des pays de l’AELE, ce qui accroîtrait encore le chômage et la crise sociale
  • Marchés publics: dans les pays du Mercosur, l’ouverture des marchés publics et des entreprises d’Etat à la concurrence étrangère va rendre plus difficile le maintien d’une politique publique ciblée sur les besoins de développement.
  • Consommateurs: les bénéfices de l’accord pour les consommateurs restent à démontrer, autant en ce qui concerne les prix que la qualité des denrées importées. Sans garde-fous, des aliments de qualité douteuse pourraient arriver plus facilement dans leur assiette. Pour garantir une transparence totale, les problématiques relatives notamment à la sécurité alimentaire (p.ex. désinfection de la viande ou cas de viande avariée), à la traçabilité (suivi des animaux clonés et de leurs descendants), à l’étiquetage (provenance) et à l’utilisation de stimulateurs de croissance interdits en Suisse doivent être pris en compte. Les termes de l’accord doivent permettre le respect des attentes des consommateurs en matière d’impact environnemental, de renoncement aux fourrages provenant de plantes génétiquement modifiées (p.ex. soja OGM), de bien-être animal et ne pas mettre en danger l’agriculture locale pour qu’ils continuent à disposer de produits de proximité.

Pour plus d’informations: