Le Parlement doit défendre le principe de transparence sur les prix des médicaments

Le deuxième volet de «mesures visant à maîtriser les coûts» (modification de la LAMal), sur lequel le Conseil national se prononce aujourd’hui, prévoit de légaliser a posteriori les «modèles de prix» avec rabais secret négociés en coulisses avec les entreprises pharmaceutiques. Comme le confirme le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence, l’Office fédéral de la santé publique a agi jusqu’à présent sans base légale. Par ailleurs, ces accords confidentiels devraient être exclus du champ d’application de la loi sur la transparence – un dangereux précédent contre lequel protestent également les associations de médias. Le Parlement ne doit donc en aucun cas approuver les manœuvres du Conseil fédéral et de l'OFSP, qui servent les intérêts des pharmas plutôt que ceux des assuré·e·s.

L’une des principales causes de l’explosion des primes annoncée pour 2024 est la hausse constante des prix des médicaments, qui représentent désormais un quart des coûts de l’assurance-maladie obligatoire. Pourtant, au lieu d’instaurer une transparence qui stabiliserait les prix, le Conseil fédéral et l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) misent sur des accords négociés en coulisses avec les entreprises pharmaceutiques. Public Eye est très critique face à ces rabais secrets car, contrairement aux affirmations du Conseil fédéral et des autorités, ils ne permettent pas de faire baisser les coûts ni d’améliorer l’accès aux traitements pour les patient·e·s, mais renforcent encore le pouvoir de l’industrie pharmaceutique. Public Eye a donc voulu savoir à quoi ressemblaient concrètement ces accords secrets entre l’OFSP et les pharmas pour dix médicaments anticancéreux parmi les plus chers en Suisse. Comme les prix effectifs ne sont déjà plus publiés aujourd’hui – et ce sans aucune base légale –, nous avons activé la loi sur la transparence (LTrans) afin d’obtenir les documents correspondants.

L’OFSP nous a certes fourni ces documents, mais après avoir pris soin de dissimuler la quasi-totalité des informations pertinentes, en les caviardant. Dans sa recommandation concernant la procédure de médiation entre Public Eye et l’OFSP, le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence (PFPDT) stipule clairement que l’office répond ainsi au souhait des partenaires de négociation qu’il a consultés au préalable, à savoir les entreprises pharmaceutiques. Selon le PFPDT, cette attitude semble «limiter le pouvoir de négociation de l’autorité concernée et impliquer un dégât d’image auprès de la population». Le PFPDT rappelle que l’objectif de l’OFSP est de «pourvoir en médicaments efficaces et économiques la population et de réduire les coûts de la santé et non de satisfaire les entreprises pharmaceutiques».

La mesure visant à exclure du champ d’application de la loi sur la transparence les rabais secrets sur les prix des médicaments, recommandée par la Commission de la santé publique et sur laquelle le Conseil national se prononce aujourd'hui, irait bien plus loin que la pratique actuelle consistant à dissimuler des données. Les documents ne pourraient même plus être demandés ; et les caviardages ne pourraient plus être contestés. L’obligation, pour les autorités, de rendre des comptes à la population, qui est un principe fondamental de la démocratie, serait ainsi sacrifiée sur l’autel du profit. Et ce sur l’un des principaux sujets de préoccupation de la population suisse à l’heure actuelle : la hausse des primes d'assurance-maladie, due à l'explosion des coûts de la santé. Une large alliance d’associations de médias proteste également contre la restriction du principe de transparence, dans une lettre adressée à l’ensemble des membres du Conseil national.

Le Parlement doit impérativement empêcher ce dangereux  précédent dans le domaine des assurances sociales. Et les partis – du PS à l’UDC, en passant par le PLR – doivent tenir la promesse de transparence faite dans leur réponse à la consultation officielle. Le but: éviter d’ouvrir une brèche dangereuse, qui ne profitera qu’à l’industrie pharmaceutique.  

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