Accord de libre-échange avec la Malaisie: la Suisse met en péril les droits à la santé et à l’alimentation
Lausanne, Zurich, 6 juin 2025
Lettre ouverte à la Secrétaire d’État à l’économie Helene Budliger Artieda ainsi qu’aux membres du Conseil fédéral concerné·e·s.
L’Association européenne de libre-échange (AELE) annonçait, en avril dernier, l’aboutissement des négociations de l’accord de libre-échange avec la Malaisie. La fuite récente d’une annexe concernant la protection intellectuelle montre cependant que cet accord contient des dispositions particulièrement problématiques dans ce domaine, en particulier:
- Les États de l’AELE accentuent la pression sur la Malaisie afin qu’elle adhère à la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV en anglais) dans sa version révisée de 1991. En y adhérant, l’échange libre de semences issues de systèmes agricoles locaux serait sérieusement entravé. En insistant sur cette disposition dans le cadre d’accords de libre-échange, la Suisse met en péril le droit à l’alimentation, comme l’a encore confirmé en 2024 le rapporteur spécial de l’ONU sur ces questions. La Coalition suisse pour le droit aux semences exige depuis longtemps du Conseil fédéral que de telles dispositions soient retirées des accords commerciaux que la Suisse négocie avec des pays économiquement plus faibles.
- L’accès de la population malaisienne à des médicaments abordables pourrait aussi être fortement péjoré par cet accord. Celui-ci contient en effet diverses dispositions en matière de droit des brevets qui restreignent la souveraineté de la Malaisie sur sa politique de santé publique. Ces dispositions vont bien au-delà du standard multilatéral instauré par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) concernant la propriété intellectuelle (accord ADPIC) – d’où leur surnom d’ADPIC+ (ou TRIPS+ en anglais). Elles profitent surtout aux multinationales pharmaceutiques en leur permettant de retarder considérablement l’arrivée sur le marché de traitements plus abordables (génériques).
Plus de trente organisations de la société civile malaisienne ont d’ores et déjà écrit à leur gouvernement, afin d’alerter sur les conséquences d’un accord de libre-échange avec l’AELE comprenant de telles dispositions. Public Eye et 5 autres ONG suisses demandent, dans une lettre ouverte adressée à la cheffe du SECO Helene Budliger Artieda, que la Suisse se mobilise pour que l’AELE renonce à ces dispositions dommageables avant de signer cet accord.