Carlsberg et Heineken demandent la révocation de leur brevet

Carlsberg et Heineken demandent à l'Office européen des brevets (OEB) de révoquer l'un de leurs brevets controversés sur de l'orge et de la bière. La coalition «Pas de brevets sur les semences» avait déposé un recours contre l’octroi de ce brevet (EP2384110) en 2017, les méthodes de sélection conventionnelle ne pouvant être brevetées. En 2018, l'OEB avait rejeté l'opposition de la coalition, qui avait alors déposé un nouveau recours. Les producteurs de bière renoncent aujourd’hui à leur brevet, bien qu’aucune décision juridique n'ait été prise.

La décision de Carlsberg et Heineken survient peu après la manifestation organisée en octobre par la coalition «Pas de brevets sur les semences», devant le siège de l’OEB à Munich. De nombreuses brasseries se sont également prononcées contre ce type de brevet au cours des dernières semaines. Les sélectionneurs d'orge ont eux aussi émis de vives critiques contre ces brevets qui entravent considérablement la sélection.

«C’est un succès d’étape important pour la coalition "Pas de brevets sur les semences". Cette annonce était attendue depuis longtemps, mais elle ne suffit pas. Carlsberg a en effet déposé de nombreuses autres demandes de brevets sur l'orge et la bière. Plusieurs ont déjà été accordées. Nous exigeons que Carlsberg renonce sans plus attendre à l’ensemble de ces brevets», déclare Erling Frederiksen du Gen-ethical Network à Berlin.

Rien n’indique toutefois que Carlsberg abandonnera d’autres brevets. En juin 2021, l'OEB a confirmé avoir encore octroyé à Carlsberg et Heineken un nouveau brevet sur l'orge et la bière. Jusqu'à présent, les sociétés ont toujours plaidé pour le maintien de leurs brevets.

«Des mesures politiques doivent être prises pour veiller à ce que les interdictions en vigueur soient appliquées, indépendamment des décisions concernant les brevets de Carlsberg et Heineken. L'OEB a déjà accordé plusieurs centaines de brevets sur des plantes sélectionnées de manière conventionnelle et n'est apparemment pas prêt de mettre un terme à cette pratique», déclare Johanna Eckhardt de la coalition «Pas de brevets sur les semences».

Dans ce contexte, la coalition «Pas de brevets sur les semences» craint notamment une portée trop large des brevets couvrant les applications des ciseaux génétiques CRISPR/Cas. Dans de nombreuses demandes de brevets, les sociétés brouillent délibérément la frontière entre la sélection conventionnelle et le génie génétique. Si ces brevets sont octroyés, ils pourront également couvrir des plantes (ou des animaux) présentant des mutations aléatoires qui ne sont pas issues d’une invention technique. La coalition «Pas de brevets sur les semences» demande que les brevets soient strictement limités aux procédés de génie génétique.

«L’équité des semences implique que les entreprises ne revendiquent que leurs véritables inventions techniques, et non les ressources biologiques nécessaires à la sélection conventionnelle. Ce principe doit devenir une priorité, en particulier du point de vue des pays du Sud», déclare Bram de Jonge d'Oxfam.

Plus d’informations (en anglais):

Les brevets sur la bière

La manifestation du 13 octobre 2021 devant l’OEB


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«Pas de brevets sur les semences» est une coalition internationale qui s’engage notamment pour mettre un terme aux brevets sur les plantes et les animaux obtenus de manière conventionnelle. Les organisations suivantes en sont membres:

  • en Suisse: Biorespect, ProSpecieRara, Pubic Eye et Swissaid
  • à l’international: Arbeitsgemeinschaft bäuerliche Landwirtschaft (AbL), Arche Noah, BUND Naturschutz in Bayern (BN), Corporate Europe Observatory, Danish Seed Savers, Gen-ethical Network (GeN), IG Nachbau, No Patents on Life, Oxfam, Plataforma Transgénicos Fora et l’Institut environnemental de Munich.