Nouvelle évaluation des entreprises textiles: la mode est toujours à l’exploitation

Alors que bon nombre d’entreprises s’engagent à garantir le versement d’un salaire vital chez leurs fournisseurs, aucune des 45 firmes interrogées par Public Eye et la Campagne Clean Clothes (CCC) ne s’assure que toutes les personnes qui fabriquent ses vêtements touchent un salaire suffisant pour vivre. Face à cette inaction, nous lançons une campagne pour demander à H&M, Tally Weijl, Zalando et Cie davantage de transparence et des salaires vitaux dans l’industrie textile mondialisée.

En dépit des belles promesses faites au cours des dernières années, les résultats de la nouvelle évaluation de Public Eye et de la CCC sont très décevants. Parmi les 45 entreprises interrogées, seule la suisse Nile indique qu’une part importante du personnel sur sa chaîne d’approvisionnement reçoit un salaire vital* et communique un délai clair pour sa mise en œuvre chez tous ses fournisseurs (2020). Jouant de la concurrence entre les pays de production et entre les fournisseurs, les entreprises continuent de faire pression pour réduire les coûts et maximiser les profits, sur le dos des dizaines de millions de personnes qui contribuent à leur succès. Dans des pays comme le Bangladesh, le Cambodge ou la Turquie, les salaires versés dans les usines devraient être multipliés par trois à cinq pour permettre aux ouvrières et ouvriers de vivre dans la dignité.  

De nombreuses firmes, comme les suisses Manor, Triumph et Tally Weijl, ne reconnaissent toujours pas leur devoir de respecter le droit à un salaire vital, même sur le papier. Et seules cinq entreprises évaluent si les prix d’achat imposés à leurs fournisseurs permettent bien le versement d’un tel salaire. Le constat est clair: les initiatives volontaires n’ont permis aucune amélioration significative des salaires. Les entreprises doivent enfin prendre des mesures contraignantes, et établir un plan d’action avec des objectifs concrets, mesurables et définis dans le temps.

Des progrès ont toutefois été réalisés en matière de transparence de la chaîne d’approvisionnement, surtout par les grandes firmes internationales. La moitié des entreprises interrogées publient désormais des informations sur leurs fournisseurs, même si la qualité des données est très variable. La plupart des enseignes suisses sont à la traîne, tout comme le géant du commerce en ligne Zalando. En forte croissance, ce «Netflix de la mode» parle beaucoup de durabilité, mettant en avant une large gamme d’articles «durables» et des «informations claires» offertes à sa clientèle. Il ne se montre toutefois même pas transparent sur la chaîne d’approvisionnement de ses propres marques.

La quasi-totalité des entreprises refusent en outre de publier des données sur les salaires versés chez leurs fournisseurs. Afin de briser ce «mur du silence» et de pousser les marques à agir, Public Eye invite les consommatrices et consommateurs à interpeller huit enseignes basées en Suisse ou très présentes sur le marché helvétique: CALIDA Group, C&A, H&M, Strellson, Tally Weijl, Triumph, Zalando et Zara (Inditex). Les internautes peuvent aussi contribuer à une recherche participative inédite, en rassemblant des informations sur d’autres marques dans une base de données dédiée à l’évaluation des entreprises textiles.

Plus d’informations auprès de:
Géraldine Viret, responsable médias, +41 21 620 03 05, geraldine.viret@publiceye.ch

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*Le salaire vital
Un salaire vital doit permettre de couvrir les besoins de base de l’employé·e et de sa famille (deux adultes et deux enfants), tout en laissant une part disponible pour l’épargne.