Un rapport le confirme: le travail des enfants reste un «ingrédient» amer de notre chocolat

Lausanne, le 5 octobre 2010 - Alors que les fabricants de chocolat mettent en avant leurs projets-pilotes pour une chaîne d’approvisionnement équitable et durable, le dernier rapport de l’Université de Tulane atteste que les pires formes de travail des enfants et la traite des enfants sont toujours d’actualité dans les plantations de cacao en Afrique de l’Ouest. Ce document étayé prouve que les efforts consentis jusqu’ici par l’industrie chocolatière afin d’enrayer le problème sont loin de porter leurs fruits.

Il y a neuf ans déjà, l’industrie du cacao et du chocolat signait le Protocole Harkin-Engel, un accord volontaire et non-contraignant par lequel les entreprises s’engagaient à mettre un terme, d’ici à 2005, aux pires formes de travail des enfants, à la traite des enfants et au travail forcé des adultes dans les plantations de cacao en Côte d’Ivoire et au Ghana. L’université états-unienne de Tulane était alors mandatée pour accompagner et documenter le processus de mise en œuvre. Vendredi dernier, elle a publié son dernier rapport, un document épais qui dresse un tableau très sombre de la situation. Le nombre d’enfants sortis du Burkina Faso et du Mali et vendus comme main-d’œuvre dans les exploitations de cacao en Côte d’Ivoire et au Ghana est sensiblement supérieur aux premières estimations. Une nouvelle particulièrement alarmante pour la Suisse, qui compte sur son territoire le plus grand fabricant de chocolat au monde et dont la consommation de chocolat est la plus importante.

Dans le cadre de cette étude, 600 enfants travaillant dans des exploitations de cacao ont été interrogés. Tous étaient soumis aux pires formes de travail des enfants. Utilisation de pesticides sans aucun matériel de protection, transport de charges lourdes, violences psychologiques et physiques sont malheureusement au programme de leur triste quotidien. Une part importante de ces enfants ont été victimes du trafic d’êtres humains. D’autres indicateurs viennent confirmer l’échec du processus de l’industrie chocolatière pour une chaîne d’approvisionnement équitable et durable. La plupart des projets mis en place par les fabricants de chocolat et leurs associations faitières se concentrent sur des questions de productivité, soit l’augmentation du rendement et la formation nécessaire des cultivateurs pour atteindre les objectifs. Si ces projets ne vont pas de pair avec des programmes sociaux dignes de ce nom, la situation des enfants dans les exploitations n’est pas prête de s’améliorer.

Même après neuf ans, la plupart de ces programmes ont encore un statut de projets pilotes. Selon le rapport de l’Université de Tulane, seuls 3% des communes ivoiriennes et 14% des communes ghanéennes où le cacao est cultivé en ont bénéficié. Dans les plantations de pays tels que le Nigeria et le Cameroun, la situation est encore plus inquiétante. Un seul constat s’impose: l’industrie chocolatière a échoué dans sa tentative de mettre en place, d’ici à 2010, un processus de certification et d’endiguer ainsi la problématique du travail des enfants. Au contraire, le rapport de Tulane montre que le nombre d’enfants exploités est supérieur aux estimations faites lors de la précédente étude en 2002.

Une coalition européenne d’ONG et de syndicats, parmi lesquels figurent la Déclaration de Berne, Oxfam et Südwind, demande donc à l’industrie chocolatière de prendre enfin des mesures sectorielles concrètes. Neuf ans après la signature du Protocole Harkin-Engel, il est plus que temps de tenir ses promesses.

Plus d’informations sur www.childlabor-payson.org.