Assemblée mondiale de la santé: l’avenir de l’OMS en question

La Déclaration de Berne était présente tout au long de la 64ème Assemblée mondiale de la santé, qui s’est déroulée à Genève du 16 au 24 mai 2011. Celle-ci a réuni plus de 2 700 délégués, comprenant des hauts responsables des 193 Etats membres de l’OMS, des ONG et d’autres observateurs. L’assemblée a adopté 28 résolutions et 3 décisions traitant des questions prioritaires de santé dans le monde. Parmi les nombreux points à l’ordre du jour, la DB a particulièrement suivi les débats polémiques concernant le plan de réforme de l’OMS, qui met en danger son indépendance, ainsi que la préparation à de futures pandémies grippales.

Pour mener à bien sa mission, l’OMS a besoin de financements souples et prévisibles, représentés par les contributions fixes des Etats membres. Or ceux-ci ne couvrent plus que 20% du budget annuel de l’agence onusienne, le reste étant composé de contributions volontaires – destinées à un usage précis – en provenance d’Etats membres, de fondations philanthropiques ou du secteur privé (notamment des compagnies pharmaceutique). En 2011, ce sont ces contributions volontaires publiques qui ont baissé, plongeant l’OMS dans une crise financière qui a précipité l’élaboration d’un plan de réforme.

Cette baisse des financements publics incite l’OMS à se tourner de plus en plus vers le secteur privé. Déjà accusée à maintes reprises d’être sous son influence, la mainmise de l’industrie pharmaceutique sur des orientations stratégiques établies en fonction d’intérêts économiques plutôt que de santé publique n’en sera que plus forte. Ainsi, un groupe d’ONG – dont la DB – ont vivement critiqué la mise en place d’un forum de santé mondial proposé comme un élément essentiel dans le plan de réforme de l’OMS de la gouvernance mondiale en matière de santé. En outre, la DB s’est associée à d’autres ONG pour alerter le Conseil exécutif de l’OMS – où la Suisse siège à nouveau pour trois ans – sur les dangers de conflits d’intérêts et de perte d’indépendance décisionnelle de l’OMS au profit du secteur privé (lire la lettre ouverte du 24 mai. Enfin, la DB, au nom d’une coalition d’ONG, a exprimé publiquement des préoccupations similaires par rapport au mode de gouvernance concernant l’initiative «Décennie de la vaccination 2011-2020», dans laquelle la Fondation Bill & Melinda Gates joue un rôle prépondérant.

La résolution adoptée en plénière sur le financement futur de l’OMS donne le feu vert à l’OMS pour se lancer dans une réforme, mais ses détails et son plan de mise en œuvre doivent encore être précisés d’ici à fin 2011. Dans sa séance clôturant l’Assemblée mondiale de la santé, le Conseil exécutif de l’OMS a réaffirmé la nécessité d’impliquer activement les Etats membres à tous les niveaux de décision et a demandé à la Directrice générale de l’agence onusienne de préciser rapidement les modalités de la future réforme concernant la gouvernance de l’OMS (y compris son financement), l’évaluation indépendante envisagée, ainsi que la tenue d’un forum de santé mondial en novembre 2012. Affaire à suivre.

Enfin un accord pour un accès plus équitable aux vaccins pandémiques

Après quatre ans d’âpres négociations, les Etats membres sont enfin parvenus à se mettre d’accord sur un mécanisme international d’échanges de virus et un accès plus équitable aux vaccins lors de futures pandémies grippales. Pour rappel, des pays du Sud avaient refusé en 2007 d’échanger du matériel viral au sein du réseau OMS tant qu’un partage équitable des avantages n’était pas garanti au sens de la Convention sur la diversité biologique, parmi lesquels une répartition équitable des vaccins pandémiques. Les pays du Sud ont dû faire face à l’obstruction systématique des pays du Nord, dont la Suisse, réticents à l’idée d’un accord limitant la marge de manœuvre de leur industrie pharmaceutique. Fruit d’un compromis, cet accord est une première étape importante mais les dispositions concernant le partage des avantages et la propriété intellectuelle sont peu contraignantes, comme l’ont souligné la DB et Third World Network – qui comptent parmi les seules ONG ayant suivi l’ensemble des négociations depuis 2007 – dans une déclaration publique En outre, la DB déplore que le lien entre ce nouvel instrument et le protocole de lutte contre la biopiraterie de Nagoya adopté en octobre 2010 n’apparaisse pas dans la résolution adoptée par l’Assemblée mondiale de la santé.