Le sommet des matières premières de Lausanne s’intéresse enfin à l’opacité du secteur

A l’occasion du troisième «Global Commodities Summit», le Secrétaire d’Etat Yves Rossier retrouvera les leaders de la branche et leur servira le discours qu’ils attendent. Il exposera ce que le Conseil fédéral préconise en guise de réponse aux nombreux problèmes que posent les négociants de matières premières: statu quo et absence de régulation. La Déclaration de Berne (DB) se jette dans l’arène pour demander davantage de transparence financière et des devoirs de diligence pour le secteur.

Parmi les plus de 400 participants à la conférence organisée à l’hôtel Beau-Rivage de Lausanne par le Financial Times sur le thème «Stratégies en période de turbulence» figurent les CEO des quatre plus grandes firmes suisses en termes de chiffre d’affaires, à savoir Vitol, Glencore, Trafigura et Gunvor. Les noms de ces leaders du secteur ont tous été évoqués récemment dans des affaires de corruption, de blanchiment d’argent, d’atteintes à l’environnement ou en raison de leur proximité avec des potentats et oligarques de pays riches en ressources naturelles. Ce triste palmarès n’empêchera pas le Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères Yves Rossier – en tant que représentant du Président de la Confédération Didier Burkhalter, dont il est l’homme de confiance – de vanter les mérites des excellentes «conditions-cadres» offertes par la première place de négoce au monde, un îlot non-régulé. Son intervention reposera sur le très léger rapport de suivi publié la semaine dernière par le Conseil fédéral, qui donne l’état d’avancement des 17 recommandations émises il y a une année.


Dans ce rapport, les autorités négligent en particulier la question du blanchiment de matières premières sales, une problématique qui a pourtant défrayé la chronique ces dernières semaines. Le fils de l’ex-président ukrainien, qui disposait à Genève de sa propre société de négoce de charbon Mako Trading, est accusé par la justice genevoise de s’être enrichi au détriment de l’Etat via le blanchiment de matières premières obtenues de manière illégale ou illégitime. Dans ses rapports d’enquête et ses dernières recherches, la DB a recensé une douzaine de firmes domiciliées en Suisse directement liées à des personnes exposées politiquement (PEP) de pays comme l’Angola, le Nigeria ou le Gabon. Trois mesures complémentaires pourraient remédier à cette situation problématique, qui participe au détournement de la rente des matières premières dans les pays producteurs. Les autorités suisses doivent adopter une loi sur la transparence des paiements aux gouvernements, à l’instar de celles votées par les Etats-Unis et l’Union européenne. Une réglementation doit en outre imposer aux négociants des devoirs de diligence destinés à prévenir l’entrée, dans les circuits commerciaux, de matières premières sales. Enfin, et ceci ne concerne pas que le négoce, les ayants droit économiques des sociétés doivent être rendus publics par le biais des registres du commerce.


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Marc Guéniat, Responsable enquête, gueniat[at]ladb.ch ou au 021 620 03 02